L’Agence judiciaire du Royaume (AJR) a lancé un programme de
formation destiné aux cadres des différents ministères. Cette première
opération, démarrée lundi dernier en partenariat avec la DAAG du ministère des
Finances, touche 194 fonctionnaires.
D’autres cycles seront organisés en octobre et les mois
suivants. Après les ministères, Mohamed Kasri, directeur de l’Agence, compte
étendre cette expérience aux collectivités territoriales que sont les régions,
les conseils préfectoraux et les communes. Pour lui, l’exécution des jugements
grève le budget de l’Etat. Entre 2016 et 2017, elle a canalisé 3,218 milliards
de DH, une enveloppe conséquente qui pouvait être consacrée au développement
économique et social.
«A l’origine de la perte de cet argent, des erreurs dans la
prise de décision, dans la gestion d’un marché public ou un travail illégal»,
explique Mohamed Kasri. Ces fautes finissent par avoir des effets
catastrophiques sur les finances publiques. C’est pour cette raison qu’il veut
que les fonctionnaires des ministères soient sensibilisés afin d’éviter ces
erreurs pour alléger le poids de ces jugements sur les finances publiques.
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Pour convaincre, il s’appuie sur un rapport de la Cour des
comptes, qui a rappelé que les jugements prononcés pendant une période de 5 ans
ont totalisé 4,6 milliards de DH. De l’argent jeté par la fenêtre, comme le
soutient un fonctionnaire qui bénéficie de cette formation de trois jours. Pour
réduire le poids de ces charges, l’AJR a mis en place une stratégie, basée sur
la prévention des contentieux, à travers la formation des cadres.
Cette institution propose de les accompagner dans la prise de
décision, à la signature des contrats ayant des effets financiers importants.
Dans cet esprit, l’Agence est en train de mettre en place une plateforme
électronique pour dispenser des consultations et des avis.
La première action de cette formation porte sur les marchés
publics. Seront abordés le cadre légal, les dernières actualités juridiques,
les types de marché, les obligations du maître d’ouvrage et celles de
l’entrepreneur, les pénalités, les intérêts moratoires, la réception
provisoire, la réception finale,… L’aspect pratique sera consacré à
l’examen de certains marchés publics, en mettant l’accent sur les techniques de
traitement du dossier contentieux sur la base de problématiques concrètes. Une
occasion pour analyser la jurisprudence des différents tribunaux sur la
question.
La voie de fait sera également abordé. Car, l’Administration
s’accapare parfois un foncier sans passer par la procédure d’expropriation.
«C’est une erreur qu’elle payera chèrement, sachant que le droit de propriété
est garanti par la Constitution», note le directeur de l’AJD devant les
fonctionnaires.
La personne lésée porte plainte, tout en demandant l’arrêt du
chantier, ce que la justice lui accorde. De son côté, l’entreprise porte à son
tour plainte et obtient finalement des indemnités. Tout cela vient de l’erreur
de l’administration qui n’a pas respecté la procédure d’expropriation, avant de
lancer son chantier.
Pour contourner cette difficulté, l’AJR propose que ce type
de marché soit lié à un visa de conformité. Ainsi, dans le cadre du contrôle a
priori, celui qui appose le visa doit s’assurer au préalable que la situation
foncière soit assainie. Dans le cas contraire, il n’apposera pas de visa.
L’arbitrage
aussi
Outre les tribunaux, les
opérateurs peuvent également emprunter la voie de l’arbitrage pour demander
réparation à l’Administration. Mohamed Kasri, lors du lancement de la
formation, cite un cas concret en cours, celui d’un investisseur qui, dans le
cadre de l’arbitrage de la Chambre de commerce internationale de Paris, réclame
à l’Etat marocain une indemnité de 170 millions d’euros, soit près de 1,8
milliard de DH.
C’est pour cela que la formation consacre une place importante à l’arbitrage.
Les fonctionnaires seront sensibilisés à l’arbitrage d’investissement, à
l’arbitrage commercial, les choix des arbitres, la convention d’arbitrage, la
procédure, la sentence, les voies de recours,… Dans le volet pratique, ils
seront confrontés au traitement d’un dossier, la préparation d’un mémoire
de réponse...