26/12/2014

Constructions: Le guichet unique n’a rien changé



- L’Economiste: Près de 2 mois après la mise en service du guichet unique de l’urbanisme, comment évaluez-vous l’impact de cette refonte?
- Karim Sbaï: L’expérience du guichet unique n’est pas encore positive. Le logiciel mis en place par la société Ribatis pour la prise de RDV, connaît un certain nombre de problèmes au niveau de son application. En plus du dépôt  virtuel, il y a le dépôt matériel.
C’est un double travail,  quelque chose de contraignant pour les architectes. On sait que ce système a pour objectif surtout l’amélioration du traitement des dossiers et le respect des délais de réunion des commissions. Malheureusement, ces commissions ne se tiennent toujours pas à temps. Il y a encore beaucoup de retard, des absences des représentants des administrations… Donc le bilan de près de 2 mois d’exercice n’est pas des plus reluisants. Il n’y a pas eu beaucoup de changement, sauf peut être moins de monde dans les couloirs du guichet unique, car le nombre de dossiers a vraiment baissé. 
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- Que reprochent les architectes à la gestion du guichet unique?
- Nous avons encore et toujours un problème avec la protection civile, un service qui nous cause beaucoup de tort. Ces difficultés avec la protection civile ont démarré avec la création du guichet unique. Pour un simple dossier, R+ 5 par exemple, l’on se retrouve avec une centaine de remarques. Ce qui n’existait pas auparavant. Nous avons des difficultés à corriger les dossiers avec la Protection civile, dont l’accueil au niveau du guichet unique laisse souvent à désirer. Les préposés au service nous renvoient souvent une montagne de remarques. Lors d’une réunion avec le wali du Grand-Casablanca, jeudi 20 novembre, la Protection civile s’est engagée à améliorer le traitement des dossiers. Nous avons aussi saisi l’occasion pour passer en revue tous les problèmes de la nouvelle version du guichet unique, avec notamment la prise de rendez-vous, les retards des commissions, l’absence des membres… Le wali a donné ses instructions pour que même en l’absence d’un membre de la commission, le projet passe pour favorable. De même, il a été décidé qu’après 48 heures de la réunion de la commission, l’avis de celle-ci est considéré comme favorable. Un comité de suivi (avec les représentants de l’Ordre, de la wilaya  et de la commune) se réunira tous les 15 jours pour voir les améliorations sur le terrain. Aujourd’hui, les doléances des architectes sont mieux écoutées et l’engagement du wali est là pour le prouver.

- En cas de manquement aux règles de base et de vices de forme, à qui incombe la responsabilité dans l’acte de bâtir?
- En principe, la responsabilité est partagée. Il y a l’architecte en tant que maître d’œuvre bien sûr. Mais aussi le bureau d’étude, l’ingénieur, l’entrepreneur, le maître d’ouvrage … C’était d’ailleurs le thème d’un séminaire où nous avons abordé le problème des  décisions de réfection. Il s’agit d’un point noir. Pour refaire la peinture, plomberie, carrelage … il faut aller à la commune pour obtenir une décision taxée.
Malheureusement, la majorité de ceux qui obtiennent cette décision l’utilisent pour effectuer des travaux plus lourds : démolition, fermeture d’une cour, terrasse … souvent en connivence avec des agents de l’administration. Il faut arrêter les décisions taxées ou revoir leur statut. Plusieurs travaux de construction qui se font dans l’illégalité proviennent de ces décisions. - Que prévoit l’Ordre des architectes contre ce type d’agissements?
- Nous allons mettre en place une cellule de suivi des projets (CSP) au niveau de l’Ordre des architectes  pour la région du Grand-Casablanca, dont les membres, salariés (architectes et autres) vont sortir sur le terrain pour vérifier la conformité des projets. Cette CSP est censée faire le travail de l’administration, qui n’a pas aujourd’hui les moyens humains pour assurer le contrôle des chantiers. Sachant que  la préfecture, les communes, l’agence urbaine ont leur la police de construction. Elle doit effectuer ce travail de suivi, aller sur les chantiers, vérifier la conformité avec les plans … Mais depuis des années, ce travail de contrôle ne se fait plus. Nous allons démarrer avec une dizaine de personnes  qui se déplaceront dans les chantiers pour constater les anomalies, le manque de suivi … S’il faut prendre des sanctions disciplinaires à l’encontre des architectes, on les prendra. Quand il faut poursuivre, on le fera. Chacun doit prendre sa responsabilité par rapport à l’acte de bâtir.
Outre cette CSP, nous avons aussi une autre cellule chargée du suivi des dossiers au sein du guichet unique. Un bureau de liaison sur place reçoit les doléances des architectes, vérifie si les commissions se tiennent à temps … Il a l’œil sur tout ce qui se passe au guichet unique. Cela permet aussi de barrer la route aux intermédiaires  qui se font passer pour des architectes. Nous avons mis en place un système de badges pour n’autoriser que les professionnels à l’accès.