26/04/2014

Marchés publics Après 50 ans, l’Etat se met en règle

C’était devenu un serpent de mer. Le ministère des Finances vient de finaliser le projet de décret sur l’octroi d’avances en matière de marchés publics. Le texte avait été prévu par le cahier des clauses administratives générales (CCAG) dont la première version remonte à 1965 et le décret royal relatif au règlement général de comptabilité publique de 1967.
L’effectivité d’avances sur les marchés publics a été longtemps réclamée par la CGEM et surtout la Fédération nationale du BTP, gros fournisseur de l’Etat. Le projet de décret prévoit la possibilité pour le maître d’ouvrage d’accorder au titulaire d’un marché public une avance avant même le démarrage des travaux. Une mesure qui s’applique à partir des marchés d’au moins 500.000 dirhams TTC et dont le délai d’exécution est supérieur à quatre mois. La tranche du marché faisant l’objet d’une sous-traitance est exclue. L’avance est octroyée en un seul versement. Si le marché est reconductible, l’acompte est accordé sur la base du montant total de la première année.
Les marchés fractionnés peuvent également bénéficier d’une avance en fonction du montant de chaque lot d’au moins 500.000 dirhams TTC. Le titulaire  de plusieurs lots d’un même marché peut également bénéficier d’une avance séparément.
Pour les appels d’offres dont le montant est d’au moins 10 millions de dirhams TTC, le montant de l’avance est fixé à 10%. Au-delà de 10 millions de dirhams TTC d’un même marché, le montant de l’acompte est ramené à 5%. Dans ce cas, le montant des avances ne peut excéder 20 millions de dirhams. Aucune révision de prix ne peut être intégrée dans le calcul du montant de l’avance.Les règles du jeu, notamment les conditions d’octroi et de remboursement des avances, sont fixées par le cahier des prescriptions spéciales (CPS) et ne peuvent changer.
Selon le projet de décret, l’entreprise adjudicataire d’un marché public doit produire au préalable une caution personnelle ou solidaire pour couvrir le remboursement de la totalité des avances reçues. Dès que les prestations exécutées atteignent 80% du montant TTC du marché, la restitution se déclenche.
Le projet de décret entrera en vigueur 30 jours après sa publication au Bulletin officiel. Les opérateurs économiques attendaient avec beaucoup d’impatience cette réglementation, qui avait trop tardé. «Cette disposition aura un impact positif sur la trésorerie des entreprises et compensera les retards de paiement qui asphyxient un grand nombre de PME. Mais nous redoutons quand même que ce texte ne connaisse le même sort que la loi sur les délais de paiement», tempère le président d’une association de BTP. L’opérateur affirme que «le plus grand souci des PME maintenant est de se faire rembourser le principal sans appliquer de pénalités de retard». L’attribution d’une avance permettrait de démarrer plus rapidement l’exécution d’un marché. «Une fois que le décret entrera en vigueur, les chefs d’entreprise seraient contraints d’acquérir de nouveaux réflexes. En effet, certaines entités pourraient toujours se révéler défaillantes et ne pas exécuter un marché public dans les règles de l’art ni dans les délais», explique un juriste. Le versement d’une avance à un prestataire de services change les rapports de force puisque le client n’est plus maître à 100% de la situation.
La réglementation des avances sur les marchés publics constitue un nouvel outil de préfinancement des marchés publics. L’objectif étant d’alléger les charges de trésorerie notamment au profit des PME. Le projet de texte vise aussi à réduire en amont les délais de paiement des marchés publics et améliorer le climat des affaires.
Les crédits d’investissement public prévus en 2014 s’élève à 49,5 milliards de dirhams, supportés par le budget de l’Etat. Le décret sur les marchés publics prévoit l’obligation de réserver 20% de la commande publique aux PME. D’où l’intérêt du projet de décret sur l’avance en matière de marchés publics pour les petites et moyennes entreprises.

Le périmètre reste à clarifier
RESTE maintenant à voir si le texte relatif aux avances s’applique aussi aux collectivités territoriales et aux entreprises et établissements publics. Ce qui n’est pas clair d’autant que dans sa note de présentation, le texte est rattaché au règlement général de comptabilité publique. Or, ce dernier s’applique uniquement aux marchés de l’Etat. Pourtant, l’article premier du projet de texte accorde la possibilité d’effectuer des versements à titre d’avance dans le cadre du décret sur les marchés publics. Un décret qui s’applique aussi bien à l’Etat, aux collectivités territoriales qu’aux entreprises et établissements publics.