30/10/2013

Projet de budget 2014 pour la CGEM, on va droit au mur

Les discussions entre patronat-gouvernement sur le projet de loi de Finances sont promises à des jours difficiles. La rencontre entre Mohamed Boussaïd, ministre des Finances, et les membres du conseil d’administration de la CGEM en a été un avant-goût. (Voir L’Economiste du lundi 28 octobre). Les chefs d’entreprises ont pilonné le ministre pendant quatre heures au cours d’une réunion marathon sur le projet de loi de Finances.
Une position loin de surprendre. «Nous sommes dans un schéma où les dépenses de l’Etat vont à la consommation plutôt que vers l’investissement, autrement dit la dépense productive», déplore Miriem Bensalah Chaqroun, présidente de la CGEM dans un entretien que les lecteurs pourront lire en intégralité dans le magazine «Les Documents de L’Economiste» qui sera diffusé vendredi 1er novembre. Le ton est donné. Le patronat reproche au gouvernement de ne pas s’attaquer au train de vie de l’Etat. Sur 306 milliards de dirhams de dépenses totales, 199,3 milliards sont destinés au fonctionnement, soit 4 fois le budget destiné à l’investissement.
Par ailleurs, entre 2010 et 2012, les dépenses de fonctionnement ont augmenté de 47%. Avec un budget de 104 milliards de dirhams en 2014 contre 98 milliards en 2013, la masse salariale de l’Etat représente 50% de l’ensemble des dépenses ordinaires du Trésor et 67,5% du budget de fonctionnement. Pour les seules années 2011 et 2012, la masse salariale a augmenté de 20%. Il est donc grand temps de s’interroger sur la productivité de l’administration publique.
Comme elle l’a souvent rappelé, Miriem Bensalah Chaqroun relève la «faible compétitivité de l’offre exportable». Un objectif qui doit être intégré dans tous les plans sectoriels et de toutes les discussions. Car seule la compétitivité est à même de dynamiser les exportations, de tirer les importations vers le bas et de contribuer à la création d’emplois. Sur le même chapitre, la patronne des patrons n’a pas de mots assez durs pour critiquer les conditions dans lesquelles les «accords de libre-échange ont été négociés». Elle y voit beaucoup de précipitations. Le résultat, on le connaît: les échanges avec la quasi-totalité des partenaires sont déficitaires. Bensalah suggère également d’identifier les clauses qui auraient pu être profitables pour le pays et qui n’auraient pas exploités. La présidente de la CGEM pousse même le gouvernement à «renégocier certains volets dans le cadre de ce que prévoit l’OMC».
La désindustrialisation du Maroc, et ce que cela génère comme effet d’éviction au profit des secteurs spéculatifs, constitue aussi un handicap pour l’économie nationale. La part de l’industrie représente actuellement moins de 15% du PIB. C’est la raison pour laquelle la CGEM avait appelé lors des dernières assises de l’émergence à un plan Marshall pour ressusciter l’industrie locale. Une stratégie qui permettra de créer des emplois, de dynamiser les exportations et de freiner les importations et donc la fuite des devises.
Dans la meilleure des conjonctures, le Maroc n’a jamais réalisé un taux de croissance de plus de 5%. Or, pour résorber le stock de chômeurs et accueillir les milliers de nouveaux demandeurs d’emploi, il faut une croissance de 8% par an. Ce qui relève plutôt de la gageure car, dans le meilleur des cas, une croissance de 4,5% est déjà une performance remarquable. «Il faut s’interroger sur la façon de franchir un nouveau cap», observe la présidente du patronat.


La TVA au travers de la gorge

Alors que les chefs d’entreprises s’attendaient à une réduction de la TVA pour relancer la consommation, le gouvernement a plutôt choisi «d’harmoniser» par le haut les taux les plus bas et de réduire leur nombre à 3 au lieu de 5. Ce qui devrait générer des augmentations de prix en cascade. D’où une grande déception du patronat qui comptait sur la baisse de TVA pour doper le pouvoir d’achat et donc relancer la consommation intérieure car elle représente «le premier moteur de croissance, loin devant l’investissement et les exportations». Pour Miriem Bensalah Chaqroun, patronne des patrons, d’autres moteurs de croissance devraient être renforcés tels que l’automobile, l’aéronautique, le textile, la pêche ou encore l’industrie pharmaceutique. Des secteurs qui pourraient constituer des atouts décisifs pour l’export.