Pourquoi une réforme des
marchés publics ? «C’est un processus continu pour se mettre au diapason des
standards internationaux», répond le trésorier général du Royaume, Noureddine
Bensouda, qui était, jeudi dernier, l’invité de la Chambre française du
commerce et d’industrie au Maroc.
Et l’enjeu est de taille : les marchés publics mobilisent annuellement 180
milliards de dirhams. Ce montant inclut les commandes de l’Etat, des
entreprises publiques et des collectivités territoriales. «Dans l’esprit de la
nouvelle réforme (portée par le décret du 20 mars 2013 et dont l’entrée en
vigueur est prévue pour le 1er janvier 2014), il ne s’agit nullement de moins
dépenser, mais de mieux dépenser pour assurer un service public de qualité»,
assure Bensouda. L’Etat, en tant qu’agent économique, ouvre via la commande
publique des opportunités de création de richesses et doit, de ce fait, veiller
à l’égalité des chances entre les entreprises. C’est dans ce cadre qu’il faut
replacer l’essentiel des innovations apportées par le nouveau cadre juridique.
Le Maroc a certes réformé sa législation en 1998 et en 2007. Deux réformes qui
ont renforcé les principes de concurrence, de transparence et d’efficience,
mais des insuffisances sont apparues dès 2009. Tout d’abord, la PME qui
constitue l’essentiel du tissu économique est pénalisée face à l’ouverture du
marché marocain sur l’international. Les opérateurs économiques décriaient
ensuite la pléthore des textes, réclamaient la simplification des dossiers
administratifs des concurrents et dénonçaient l’opacité qui entoure les
critères d’appréciation et de notation des offres. Même l’intégralité des
membres des commissions des appels d’offres était mise à l’index. Certains
corps de métier n’ont pas en effet hésité à dénoncer le conflit d’intérêts que
ces membres pourraient avoir dans les entreprises soumissionnaires. D’autres
milieux professionnels critiquaient l’annulation de certains appels d’offres
sans en préciser les motifs et sont allés jusqu’à reprocher à certains
départements ministériels d’être en même temps régulateur, client et opérateur.
Pour remédier à cette situation, le décret de mars 2013 a été le premier texte
à être soumis à la consultation publique. Après un colloque national sur les
marchés publics, organisé en avril 2009, le processus de concertation a été
consolidé par la publication du projet de décret sur le site du Secrétariat
général du gouvernement. Et durant trois années, la concertation a été engagée
dans le cadre d’une série d’ateliers tenus avec les fédérations
professionnelles, l’Ordre national des architectes, le ministère
de l’Intérieur et les établissements publics. Ce qui a permis d’enrichir le
projet par des propositions qui se rapportent à l’accès à l’information et à la
publication des documents d’appel à la concurrence. «Car l’encadrement
juridique à lui seul n’est pas suffisant», reconnaît Bensouda. C’est pourquoi
la TGR a veillé à intégrer les changements induits par cette réforme au niveau
du système de gestion des dépenses de l’Etat. Elle a également amené les
collectivités locales à adopter un système de comptabilité générale en
convergence avec les normes comptables de l’Etat.
De plus, la consécration de la bonne gouvernance des affaires publiques en
déclinaison des principes de la Constitution induit une refonte en profondeur
des règles de passation, de contrôle et de gestion de la commande publique. Le
tout, selon une logique de clarification et de simplification des procédures.