C’est un projet de loi modifié et beaucoup plus clair qui
vient d’être adopté par le Conseil de gouvernement. Une bonne nouvelle pour les
partenariats publics-privés qui étaient, jusque-là, régis par une vieille loi
incomplète et qui ne constituait pas un cadre juridique adéquat pour leur
réussite. En effet, le texte de base ne réglementait que la gestion déléguée
des services publics (la loi n°54-05), sans se soucier du partenaire privé.
Depuis 1997, date du premier PPP au Maroc, à aujourd’hui, le pays a recouru à
ce type de contrat pour la réalisation de 11 grands projets d’une enveloppe
globale de 67 milliards de DH. Désormais, la nouvelle loi (n° 86-12) permettra,
tel que stipulé dans l’article premier, à une personne publique (Etat,
établissement public de l’Etat ou entreprise publique) de «confier à un
partenaire privé la responsabilité de réaliser une mission globale de
conception, de financement, de tout ou partie, de construction ou de
réhabilitation, de maintenance et/ou d’exploitation d’un ouvrage ou
infrastructure nécessaire à la fourniture d’un service».
Il faut, toutefois, noter que le projet de loi a connu des modifications qui
l’ont clarifié et surtout permis de supprimer des erreurs flagrantes. La première
mouture contenait des bizarreries, laissant comprendre que le texte est un
«copier-coller» d’une autre loi. Pour définir l’équilibre du contrat, l’article
abordant le partage des risques renvoyait à l’article 14 qui traite les
modalités de rémunération, n’évoquant à aucun moment la question d’équilibre.
L’avant-projet de loi était, en effet, flou, vague et peu précis (voir
L’Economiste édition n° 3934 du 21/12/2012). D’ailleurs, il a fait l’objet de
vives critiques. «Il faut que la loi précise si l’on veut un partenaire
financier ou un partenaire qui exploite le service», avait indiqué Jean-Pierre
Ermenault, le délégué général de GDF Suez Maroc, lors de son passage au Club de
L’Economiste. Et d’ajouter: «Le mode de rémunération est aussi un aspect important
à éclaircir». Un constat pertinent qui a été pris en considération par les
auteurs du projet de loi qui, en rectifiant le texte, ont introduit un article
dédié aux modalités de rémunération du partenaire privé. L’article 15 stipule:
«le contrat de PPP fixe les conditions et les modalités de rémunération qui
doivent prévoir nécessairement la disponibilité du service considéré et le
respect des objectifs de performance…». Cette disposition est déjà prise par la
société publique, Casa Transport, pour la rémunération de l’exploitant du
tramway, Casa Tram (RATP, CDG et Transinvest). Le contrat, qui s’étale sur cinq
ans (2013-2017), a instauré 50 critères de performance (roulement des rames,
disponibilité des conducteurs, entretien du matériel, information des
voyageurs, etc.). Il précise que la rémunération de la société se fera sur la
base du service rendu et des charges engagées et reposera sur un système de
bonus-malus garantissant la progression des performances du réseau avec des
résultats contrôlables.
Aussi, la loi précise que «la rémunération est effectuée en totalité ou en
majorité par la personne publique». «Le contrat peut prévoir la rémunération du
partenaire privé en partie par les usagers et/ou par les recettes découlant de
l’exploitation des ouvrages, biens et équipements objet du partenariat», est-il
noté. Pour garantir l’exécution du contrat de PPP, «la loi ne fait référence
qu’au contrôle des obligations du partenaire privé, sans se soucier de celles
du partenaire public», relève un expert. «La personne publique contrôle
l’exécution du contrat et la façon dont le partenaire privé respecte, notamment
les objectifs de performance et la qualité des services convenus, ainsi que les
conditions dans lesquelles le partenaire privé fait appel à d’autres
entreprises», souligne le texte, ajoutant que la convention peut prévoir les
modalités d’exercice du contrôle.
Risques
La passation d’un contrat de PPP, dont la durée est fixée de
5 à 30 ans, sera effectuée soit par le dialogue compétitif, soit par l’appel
d’offres ou exceptionnellement par la procédure négociée. Le contrat devra
nécessairement comporter 20 clauses (objet, durée, objectifs de performance,
modalité de financement et de rémunération, cession, règlement des litiges,
résiliation anticipée.
Concernant les risques, la convention devra
fixer les conditions dans lesquelles sera établi le partage des risques entre
la personne publique et le partenaire privé y compris ceux résultant de
l’imprévision et de la force majeure. «Les risques liés aux différentes phases
du projet devront être identifiés et décomposés. Ils sont pris en charge par la
partie jugée capable de les supporter de manière à minimiser leurs coûts en
prenant en considération l’intérêt général et les caractéristiques du projet».
Pour le règlement des litiges, le contrat de PPP prévoit une procédure de
conciliation préalablement à tout recours arbitral ou judiciaire. Notons que la
nouvelle loi ne s’applique pas aux projets de PPP déjà initiés ou en cours de
réalisation.