-Le phénomène de la corruption dans les
marchés publics touche principalement les secteurs du BTP et de
l’édition-imprimerie
-Par informel, l’on entend également les
cadeaux déguisés, offerts pour décrocher des marchés publics
Quels sont les boulets qui plombent le développement de la
PME au Maroc? Tel est l’objet de l’étude commanditée par l’Union européenne,
via le Femise (Forum euro-méditerranéen des Instituts de sciences économiques),
à Hammad Kassal, professeur universitaire et patron de PME. Les résultats de
l’enquête ont été rendus publics, vendredi et samedi 23 et 24 novembre, devant
des représentants de la Banque mondiale, du FMI, des experts internationaux et
nationaux ainsi que des chercheurs qui s’intéressent aux problématiques de la
PME. Selon l’étude, la croissance de la PME nationale est plombée par 5 types
de freins. Pour 60% des chefs d’entreprises interrogés, l’accès au financement
constitue le premier obstacle. Ce sont essentiellement les entreprises de
petite taille. De plus, certains secteurs éprouvent plus de difficultés que
d’autres pour obtenir un financement bancaire. Il s’agit essentiellement du
textile-habillement, imprimerie & édition et de la plasturgie. «Le
principal obstacle qui empêche ces entreprises d’obtenir un crédit bancaire
porte sur l’exigence de la caution personnelle, qui met en danger le patrimoine
personnel et familial de l’entreprise en cas de défaillance», explique Kassal.
En effet, bon nombre de chefs d’entreprises en faillite se voient saisir leurs
biens immobiliers hypothéqués auprès des banques pour rembourser leurs dettes.
Outre l’accès au
financement, les PME sont également confrontées à la rareté du personnel
qualifié. «58% des entreprises sondées souffrent du manque de ressources
humaines ayant des habiletés de leadership, de communication. De plus, les PME
sont également touchées par le braconnage de personnel qualifié par d’autres
employeurs», analyse Kassal. Les secteurs de l’offshoring, des NTI et de
l’automobile sont plus touchés que d’autres par le phénomène du «débauchage»
des cadres chevronnés. Autre frein au développement des PME, les
réglementations administratives, juridiques et fiscales. Ainsi, 56% des
entreprises interrogées déclarent être confrontées aux lourdeurs
bureaucratiques liées notamment à l’enregistrement des terrains, à la
sécurisation des droits de propriété… La législation du travail représente
également un frein devant la croissance des PME. Certaines clauses sont
d’ailleurs difficiles à mettre en œuvre par les petites structures.
L’informel et la corruption ne sont pas en reste.
Depuis le début du printemps arabe, bon nombre d’opérateurs ont constaté un
regain des activités de contrebande et de l’informel à la faveur de la
permissivité des contrôles. D’ailleurs, selon l’étude commanditée par l’UE, 52%
des PME se déclarent «concernées par la concurrence des entreprises
informelles». Par informel, l’on entend également les cadeaux déguisés, offerts
pour décrocher des marchés publics ainsi que les coûts du travail, associés à
l’embauche d’employés non déclarés. «Le phénomène de la corruption dans les marchés
publics touche principalement les secteurs du BTP et de l’édition-imprimerie,
car ils sont les plus dépendants de ces marchés pour leur activité», déclare
Kassal.
Depuis la multiplication des accords de
libre-échange, de nombreuses entreprises pointent du doigt l’explosion des
importations. Un phénomène qui s’explique aussi par l’amélioration du pouvoir
d’achat et les nombreuses stratégies sectorielles lancées par le gouvernement.
Mais ces importations génèrent une forte concurrence pour les PME nationales.
44% des ces structures évoquent comme freins à leur développement la
variabilité de la demande étrangère ainsi que les arriérés de paiement. Un
problème qui s’est accentué depuis l’avènement de la crise économique. La
sous-traitance, l’automobile ainsi que le textile-habillement sont les secteurs
les plus touchés.
Contrairement aux PME des autres pays du Maghreb,
les structures nationales ne souffrent pas de la faiblesse des infrastructures.
En effet, à peine 12% des firmes interrogées déclarent que l’infrastructure
constitue un frein à leur croissance. «Les PME ont profité de la libéralisation
du secteur des télécommunications et de l’arrivée de nouveaux opérateurs, ainsi
que des politiques de développement régional ayant contribué au renforcement de
l’électrification du territoire et la construction d’un réseau routier de
qualité», explique l’auteur de l’étude.
Rappelons que cette enquête a touché 125
dirigeants de PME nationales, employant entre 1 et 200 salariés. Les entretiens
ont été réalisés de visu entre juillet et septembre 2012. L’échantillon est
composé de PME des principales régions et représente tous les secteurs
d’activité.