12/05/2012

Commandes publiques : 87% du portefeuille de l’Etat ne disposent pas d’un texte juridique clair


Les marchés publics constituent l’outil privilégié par lequel les entreprises et établissements publics réalisent leur programme d’investissement. Le recours aux marchés publics pour la réalisation des investissements n’est pas exempt d’anomalies. Ces anomalies peuvent aller du retard d’exécution des ouvrages aux déperditions financières.
Le dernier rapport annuel de la Cour des comptes relatif à l’exercice 2010 fait montre que des insuffisances entachent encore le système de gouvernance des finances publiques. Des insuffisances qui, faute de redressement, risqueraient de remettre en cause les efforts entrepris par les pouvoirs publics pour consolider les bases d’une gestion saine et soutenable. Le système de contrôle des finances publiques demeure marqué par une multiplicité des intervenants et une diversité des procédures  et de techniques d’investigation. Il reste malheureusement beaucoup plus orienté vers un contrôle de régularité et de conformité que vers un contrôle axé sur l’évaluation des résultats et des performances. Mais cela n’empêche pas de dire que des réformes ont été déjà initiées à plusieurs niveaux et que des efforts notables ont été déployés. On peut citer à cet effet le contrôle financier exercé sur les établissements publics, la définition des responsabilités respectives des ordonnateurs, contrôleurs et comptables, ainsi que les juridictions financières (instauration des cours régionales des comptes).
Globalement, le champ d’application du contrôle financier continue de couvrir tous les organismes publics où l’Etat est financièrement engagé, à l’exception de ceux qui connaissent un contrôle particulier.
Dans le cadre de cet article, il s'agit d'aborder un autre aspect de la mauvaise gouvernance ayant entaché certains organismes publics cités dans le dernier rapport de la Cour des comptes : le non-respect de la réglementation des marchés publics. Il est utile de rappeler que les marchés publics constituent l’outil privilégié par lequel les entreprises et établissements publics réalisent leur programme d’investissement. Or, souvent, le recours aux marchés publics pour la réalisation des investissements n’est pas exempt d’anomalies.
Marchés publics : des errements de différentes natures
Sur 469 entités publiques, seules 60 disposent de leur propre réglementation en matière de marchés publics, ce qui représente 13% de l’ensemble des établissements publics et sociétés d’Etat. «Or, 87% constituant le noyau dur du portefeuille de l’Etat réalisent leurs commandes publiques selon des procédures et des conditions non encadrées par un texte juridique clair», nous explique une source proche du dossier. Cela est dû à l’absence de règlements fixant les conditions et les formes de passation des marchés publics propres à certains établissements.
Aussi, selon notre propre source, on relève également d’autres insuffisances  telles que la non tenue des registres des ordres de services pour l’exécution des marchés ou les insuffisances en matière de suivi et de contrôle techniques des marchés de travaux. Le recours excessif aux marchés dits de régularisation constitue une entorse dans la mesure où il repose sur le choix du prestataire unique. «Ce qui se traduit par une tendance douteuse quant à la détermination des prix. Il peut également entraîner un manque d’efficacité de la dépense publique», confie notre source.
Une autre insuffisance fréquemment relevée est celle relative à la non tenue des ordres de services pour l’exécution des marchés, sachant que la pièce maîtresse de la gestion des marchés publics est matérialisée par le registre de suivi des ordres d’arrêt et de reprise qui doit être paraphé, numéroté et signé par l’ordonnateur de l’organisme public. Pis encore, la non tenue des registres des ordres de services pour l’exécution des marchés a un impact sur la maîtrise des délais d’exécution qui se répercute sur la qualité et la mise en œuvre des prestations et des travaux, la non application des pénalités de retard; ce qui constitue un manque à gagner pour les finances publiques.
Autre écueil : le retard dans l’exécution des ouvrages publics et leur mise en place au profit des populations cibles porte préjudice au service public et aux intérêts des agents et des citoyens économiques et sociaux.
A l’occasion de plusieurs contrôles de marchés de travaux, le contrôleur peut constater des errements de différentes natures (voiries, assainissement, construction, adduction d’eau, éléctrification…).
Parfois, les écarts sont très significatifs et entraînent un préjudice financier important pour les organismes publics.
On peut citer l’exemple du marché n°199/2006 relatif à la plomberie et à la climatisation du Centre hospitalier Ibn Sina. Parmi les défaillances relevées par la Cour des comptes pour la réalisation de ce marché, on peut citer le lot climatisation et ventilation qui n’a pas été respecté, les écarts entre les prévisions et les réalisations qui dénotent, d’une part, d’un manque de visibilité dans le processus prévisionnel d’élaboration des besoins et, d’autre part, d’une faible maîtrise de la gestion des marchés au moment de la réalisation des travaux. Ajoutons à cela le non respect des délais d’exécution et de réalisation des travaux de construction dont les dépassements ont été justifiés par des ordres d’arrêts et de reprises des travaux  qui n’ont été établis que pour exempter les adjudicataires de marchés des pénalités de retard. Aussi, relève-t-on dans le rapport de la Cour des comptes que les prix figurant dans les bordereaux formant l’offre financière ont tous été modifiés sans que ces modifications soient approuvées par l’entrepreneur.
Les exemples ne manquent certainement pas. Mais la  question qui se pose est comment identifier qu’une faute est faite de manière volontaire ou pas. L’essentiel est que les différents cas traités par la  Cour des comptes aient une suite pour que la bonne gouvernance soit effectivement de mise à un moment où les finances publiques sont ce qu’elles sont
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