23/12/2011

Jurisprudence : La mauvaise exécution d'un précèdent marché ne suffit pas pour éliminer un candidat

A l'occasion d'un arrêt du 15 décembre, les magistrats du Conseil d'Etat rappellent une nouvelle fois qu'un candidat ne peut être éliminé de la procédure de passation d'un marché public uniquement en raison de ses manquements dans l'exécution de précédents marchés.
En l'occurrence, un centre hospitalier avait lancé une procédure pour la passation d'un marché public de prestation de blanchissage d'articles textiles. Un concurrent conteste son éviction du marché qu'il juge irrégulière et demande une indemnisation en réparation de son préjudice. Ce dernier reproche à la commission d'appel d'offres (CAO) d'avoir rejeté son offre en se fondant uniquement sur ses manquements lors de l'exécution de précédents marchés, sans rechercher si d'autres éléments du dossier lui permettaient d'apporter les garanties demandées.
Pour rappel, afin de choisir l'attributaire, l'acheteur public doit examiner les candidatures "au regard des niveaux de capacités professionnelles, techniques et financières" des concurrents (article 52 du Code des marchés publics). L'ensemble de ces critères doit être mentionné dans l'avis d'appel public à concurrence ou dans le règlement de consultation.
La mauvaise exécution de précédents marchés peut constituer l'un des éléments sur lesquels se fonde le pouvoir adjudicateur afin de déterminer si le candidat a ou non les capacités d'assumer les prestations demandées. Toutefois, ce critère ne peut justifier à lui seul son élimination. En effet, l'acheteur doit examiner le dossier du candidat dans son ensemble et vérifier si les garanties exigées ne sont pas justifiées par d'autres éléments.
Prenons l'exemple de l'attributaire d'un marché de travaux qui se serait vu reprocher des retards dans la livraison du chantier dus à un nombre insuffisant d'employés. Dans le cadre d'un nouveau marché, le candidat peut justifier avoir procédé à l'embauche de nouveaux salariés afin de pallier cette carence en personnel. Il ne pourra par conséquent pas voir sa candidature rejetée du seul fait de ces nombreux retards.
Ce principe n'est pas nouveau. La cour administrative d'appel de Paris, dans une jurisprudence de 2007, avait conclu à l'illégalité de la décision d'une CAO ayant rejeté une candidature uniquement pour des manquements dans l'exécution de marchés antérieurs sans examiner, dans son ensemble, le dossier de candidature de la société.
Cette position a par la suite été confirmée par les magistrats du Conseil d'Etat en 2009. Ils précisaient toutefois qu'"en l'absence de garanties nouvelles suffisantes", une CAO peut rejeter la candidature d'une société en raison de ses divers manquements lors de l'exécution d'un précédent marché.
De même, Bercy a consacré une fiche-conseil aux acheteurs à cette question, laquelle précise qu'un "candidat peut être effectivement écarté s'il ne fournit pas d'autres références que ces marchés litigieux".