04/06/2022

Agent (e) de gardiennage ou de nettoyage : en fin un plaidoyer

Oxfam Maroc jette, dans un récent plaidoyer, une lumière crue sur les multiples dysfonctionnements dont souffrent les deux secteurs de gardiennage et de nettoyage. Elle estime que la responsabilité est partagée entre société civile, politiques et individus.

- Selon une note de plaidoyer rendue publique le 6 mai par Oxfam Maroc, les agents de gardiennage et les employés de nettoyage font partie des professionnels les plus touchés par la précarité de l’emploi et la dureté des conditions de travail. Pourtant, ces activités (gardiennage et nettoyage) sont définies dans le cadre de contrats de services établis selon un cahier de prescription spécial (CPS). Comment expliquez-vous ce dysfonctionnement et quel état des lieux dressez-vous ?


- Pour répondre à votre question, permettez-moi d’abord de vous remercier pour l’emploi du mot « dysfonctionnement » que je vais reprendre comme élément de réponse mais au pluriel en y ajoutant un grand S. Je vous énonce donc les multiples dysfonctionnements dont souffrent ces deux secteurs, et qui font que les contrats de services établis soient indignes et indécents ou non respectés dans le cas échéant. Premièrement, il y a le dysfonctionnement au niveau des marchés publics.

La pratique du moins-disant conduit à une perception des salaires de l'agent (e) de gardiennage ou de nettoyage comme étant des coûts de transaction, et peut même conduire à la non déclaration des travailleurs et travailleuses au niveau de la CNSS et des compagnies d’assurances, ce qui fragilise leur situation et conduit les patrons à signer des contrats avec des prix dérisoires. Le salaire devient donc la seule cible pour l’entreprise de nettoyage ou de gardiennage pour dégager un bénéfice sur la transaction. Résultat : des salaires nets entre 1200 et 2600 dirhams synonymes de précarité et d’incapabilité d’acheter toute paix sociale.

Notre plaidoyer appelle d’abord à bannir la pratique du moins-disant comme seule critère de décision, et à exiger au préalable dans les appels et termes de références des salaires qui respecteront les charges et risques de travail de cette catégorie de travailleurs et travailleuses. Opérationnellement, il faut donc spécifier, voire imposer une fourchette de marge bénéficiaire, au-delà du coût de revient des salariés - toutes charges confondues comprises - à arrêter et standardiser.
Espace publicitaire: Avez-vous besoin d’une formation ou conseil en marchés publics et PPP, vous pouvez discuter directement avec un consultant spécialiste du Centre des Marchés Publics. Cliquer sur ce lien (notre site) et choisir un moyen pour nous contacter 
Le deuxième dysfonctionnement est au niveau de la conformité sociale. En effet, l’État est socialement responsable, en premier lieu, de l’assainissement d’une culture de respect de la législation sociale. Le fait de délaisser ces secteurs depuis des années ne peut qu’encourager les moins « responsables » d’entrer au marché et de maintenir le statu quo dans les pratiques de dévalorisation, d’exploitation des travailleurs au niveau opérationnel.

Dans ce sens, nous appelons à exiger des audits sociaux en amont des grands marchés et pour certaines catégories d’entreprises ayant une taille moyenne, voire grande ; nous appelons aussi à renforcer l’inspection du travail et mettre en place des cellules d’écoute de doléances d'agents de nettoyage et de gardiennage victimes de burnout ou de licenciements abusifs. Il faut aussi établir une charte d’éthique pour les donneurs d’ordre convertible en projet structurant en vue de cultiver des pratiques de conventions collectives pour ces secteurs.

Le troisième dysfonctionnement réside au niveau des ressources humaines. Reconquérir les collaborateurs et collaboratrices de ces secteurs est devenu l’un des défis majeurs pour les dirigeants des entreprises. L’intensité et la robustesse du lien symbolique durable entre l’entreprise de gardiennage ou de nettoyage et ses collaborateurs ont fortement diminué au fil du temps. La question du lien entre le recours à l’externalisation et cette perte mérite d’être posée, notamment quand le critère majeur visible de la décision du dirigeant-décideur est la diminution des coûts directs de main-d’oeuvre. Simple « ressource » à laquelle on accole le qualificatif d’ « humaine », le collaborateur n’est alors vu que comme une « charge » dite fixe. Face à la perception d’une menace existentielle, tout organisme vivant engage des stratégies de protection et de riposte.

Ainsi, nous appelons à assouplir et encourager les entreprises à participer dans la conception et la réalisation des formations sur mesure à l’intérieur de leurs structures. Il y a aussi nécessité pour les entreprises du gardiennage privé de la réalisation des enquêtes de satisfaction auprès du public, surtout dans des secteurs comme ceux de la Santé et de l’Education afin d’améliorer la qualité du service rendu.

Nous recommandons aussi d’encourager le travail d’équipe et former davantage le premier niveau de supervision en vue de le doter de compétences en dynamique de groupe et de communication ; d’exiger une formation de base (en gestion) pour l’employeur ou gérant, ainsi que d’exiger une carte professionnelle (avec un code national) pour tout agent opérant dans le secteur et une certification standard gérée par un établissement étatique en tant que formation de base nécessaire à la qualification pour ces métiers.

Pour lire aussi la suite, cliquer sur le lien source ci-après.

Source