Fausses informations sur le chiffre
d’affaires ; falsification de garantie de soumission ; falsification
de curriculum vitae, de diplômes et autres documents liés au personnel ;
falsification d’agrément technique ; falsification de pièces
administratives, collusion entre soumissionnaires, surfacturation, usage
d’informations confidentielles, ententes anticoncurrentielles, abus de
positions dominantes en vue de fausser le libre jeu de la concurrence…
Les cas
de fraude ou tentatives de fraude sont légion dans le domaine des marchés
publics au Burkina. C’est du moins, ce que dit constater le Comité de règlement
des différends, qui en est saisi au quotidien.
Ces pratiques sont commises par des
soumissionnaires, des titulaires des marchés publics ou même des agents
publics. L’objectif étant de distordre la concurrence à leur profit. Pourtant,
le marché public s’entend de toutes les formes d’acquisition de biens,
services, prestations au profit de l’Etat, des collectivités territoriales, des
établissements publics, les sociétés d’Etat et d’économie mixte à participation
publique majoritaire. Et, donc qui favorise le jeu de la concurrence. C’est
pourquoi, les marchés publics sont encadrés par Le décret n°2008-173 : PRES/PM/MEF
du 19 avril 2008 portant Réglementation Générale des Marchés Publics (RGAP) et
des délégations de service public.
Des tentatives de fraudes à toutes les
étapes
C’est un fait. La corruption et la fraude
existe dans le domaine des marchés publics au Burkina. Et, tous les panélistes
l’ont reconnu, d’une manière ou d’une autre. Que ce soit Mamadou Guira,
secrétaire permanent de l’Autorité de régulation des marchés publics (ARMP),
Hermann Doanio, chargé de programmes du Centre d’information, de formation et d’études
sur le budget (CIFOEB), Boureima Ouédraogo, directeur de publication du
bimensuel Le Reporter, ou bien Claude Wetta, secrétaire exécutif du REN-LAC et
le modérateur du panel.
Les cas de fraude peuvent intervenir
durant toutes les étapes du processus (Conception, préparation des dossiers
d’appel d’offres ; sélection de l’attributaire ; la mise en œuvre du
marché, et même après la clôture du marché). Les fraudes, tentatives de fraude
et autres cas de corruption dans les marchés publics s’expliqueraient par
l’incompétence des candidats aux marchés publics, leur non qualification, la
course effrénée vers le gain facile par les agents publics et les acteurs du
secteur privé, le fait que les sanctions prévues par la règlementation ne
soient pas être assez dissuasives, mais aussi et surtout la faiblesse du
« burkindisme » (intégrité) des acteurs. Le développement de la
technologie aidant, il est de plus en plus facile de produire un document qui
ne comporte aucun signe distinctif d’avec celui délivré par la structure
habilitée.
La Banque mondiale interpelle le
gouvernement
« Le phénomène a atteint une telle
ampleur que le gouvernement du Burkina Faso a été saisi par la représentation
résidente de la Banque mondiale qui dit avoir constaté des cas récurrents de
faux documents produits par les soumissionnaires dans leurs offres. Un comité a
été mis en place comprenant les représentants de la DGCMEF et de l’ARMP en vue
de faire des propositions appropriées », confie Mamadou Guira, le
secrétaire permanent de l’ARMP. « La société moderne est sujette à des
actes d’enrichissement illicite et de perte de valeur morale ; toute chose
qui entame fortement l’intégrité des burkinabè », regrette-t-il. Fort
heureusement, les dispositions réglementaires prévoient des sanctions en vue de
dissuader les auteurs de fraude et de corruption. Ces sanctions sont soit
pénales, administratives ou disciplinaires. Alternativement ou cumulativement.
Et, selon les panélistes du jour,
l’assainissement du secteur passera nécessairement par la formation, la
sensibilisation, la professionnalisation et la valorisation de la fonction
« marché » par un traitement salarial incitatif, l’élaboration d’un
code d’éthique, de déontologie et d’intégrité dans les marchés publics… Car,
« la fraude, tout comme la corruption, les conflits d’intérêt, la
collusion, la manipulation d’informations, la discrimination dans le processus
de passation des marchés entament l’intégrité du système de gestion des marchés
publics », soutient Mamadou Guira.
Encourager le contrôle citoyen
En complément au contrôle des corps
habilités, il y a également le contrôle citoyen (effectué par les conseillers,
les citoyens). « Ce dernier est plus sincère et porte sur l’impact des
réalisations et les intrants utilisés et permet de mieux faire une répartition
des investissements et de détecter les défaillances dans l’exécution du marché
avant la fin des travaux », précise Hermann Doanio, chargé de
programmes du CIFOEB.
Pour venir à bout de ces pratiques
illicites ou à défaut les réduire considérablement, il convient d’édicter des
règles objectives, transparentes et surtout mettre des garde-fous à tous les
niveaux. Le panel de ce 25 janvier avait pour objectif de mieux outiller
journalistes à pouvoir déceler la corruption et la fraude dans les marchés
publics. En tout cas, ils ont massivement répondu à l’invitation. Pourvu que ça
se reflète dans leurs productions.