Le Maroc est comme un foyer qui dépense généreusement pour la scolarité de ses enfants dans l’espoir qu’ils excellent et qui, pourtant, obtiennent des notes moyennes à l’école.
Une métaphore qui résume bien le marasme de l’investissement dans notre pays qui paralyse sa trajectoire de développement au moment où le gouvernement fait la course contre la montre pour sortir la nouvelle charte qui promet un sursaut sans précédent. Infrastructure, projets de développement, plans sociaux, l’Etat passe à la caisse depuis des années, mais la croissance n’est pas au rendez-vous. Pour cause : un retour sur investissement faible.
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Beaucoup d’investissement, peu de croissance !
Force est de constater que le Maroc est l’un des pays où
l’investissement est le plus élevé. Le Royaume investit 32,2% de son PIB alors
que la moyenne internationale ne dépasse pas 25%. Il n’obtient en échange
qu’une piètre croissance par rapport aux pays qui ont autant investi. Ces
derniers réalisent en moyenne 6% de croissance au moment où le Maroc peine à
dépasser le seuil moyen de 3%.
Sur les vingt dernières années, où le pays a entamé la
modernisation de son économie, il n’a réalisé que 4% en moyenne de 2000 à 2019.
Cette moyenne s’est dégradée lors de la décennie de 1 point. Le paradoxe, c’est
que le Maroc est en troisième position derrière la Chine et l’Inde à l’échelle
des Etats investisseurs (par rapport à leur PIB) et dépasse des pays émergents
tels que la Corée du Sud, la Turquie, la Malaisie et la République Tchèque. Des
pays qui ont réalisé des miracles économiques.
Une autre observation issue d’une étude de Bank Al-Maghrib
reflète l’ampleur du paradoxe. Le taux d’investissement du Maroc durant les
vingt dernières années équivaut à celui des dragons asiatiques de 1970-1990,
période de l’ascension fulgurante de ces pays qui semblent aujourd’hui si
prospères. Ceci dit, notre pays a échoué dans sa démarche de rattrapage
économique comme l’ont fait les Asiatiques bien qu’il ait consenti autant
d’efforts en termes d’investissement.
Pour comprendre à quel point la situation est compliquée, il
suffit de réaliser qu’il faut 9,4 points de PIB investis pour un point de
croissance. Ce ratio est jugé élevé puisque moins ce coefficient est grand,
plus l’investissement est rentable.
Un secteur privé trop timide
Il faudra donc comprendre les raisons de ce marasme qui dure
encore devant nos yeux. Si l’Etat investit des sommes colossales, le secteur
privé n’est pas aussi audacieux, en ne prenant pas assez d’initiative. Les
chiffres sont parlants. L’Etat accapare 65% de l’investissement global, soit
plus des deux tiers avec une contribution de 16% à la croissance. Par contre,
le privé se contente d’un seul tiers.
Cette part jugée faible est l’une des raisons qui justifie la
faible rentabilité de l’investissement au Maroc, estime Mohammed Jadri,
Directeur de l’Observatoire du Travail gouvernemental. “L’investissement public
ne suffit pas pour faire tourner la machine de la croissance autant qu’on le
veut”, explique l’économiste, ajoutant qu’il faut compter davantage sur le
secteur privé dans les années à venir.
Selon l’expert, d’autres éléments font que l’investissement
ne soit pas à la hauteur des espérances. Il en cite la corruption, la
bureaucratie et la rigidité de l’Administration, et la culture du capital
marocain qui tend à ne pas prendre assez de risque dans ses placements. “Au
Maroc, on préfère le confort puisqu’on préfère investir dans les secteurs jugés
sûrs tels que le foncier et l’immobilier”, souligne notre interlocuteur.
Charte de l’Investissement : l’ultime espoir ?
Cette réalité gêne le gouvernement qui veut en finir avec les
vestiges d’un marasme qui dure des années. Lors de sa dernière apparition à la
Chambre des Conseillers, le Chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, a reconnu
que l’investissement n’est pas suffisamment orienté là où l’effet social et
économique est le plus palpable. Il n’a pas manqué aussi de soulever la faible
contribution du secteur privé à l’investissement. Une part que l’Exécutif
souhaite porter aux deux tiers de l’investissement global, selon Youness
Sekkouri, ministre de l’Inclusion économique, de la Petite entreprise, de
l’Emploi et des Compétences, qui s’est confié dimanche à France 24. D’ailleurs,
il s’agit là de l’une des recommandations majeures du Nouveau Modèle de
Développement.
Pour pallier au marasme de l’investissement, l’Exécutif parie
sur deux éléments, à savoir la réforme du Code des marchés publics et du
Crowdfunding. En outre, l’Exécutif place tous ses espoirs dans la future Charte
de l’Investissement qui est toujours en gestation. Cette loi très attendue
promet d’encourager les PME et les TPE et de faciliter l’acte d’investir. Ce
coup de pouce aux TMPE est si nécessaire que ces entreprises ne disposent que
de 40% du chiffre d’affaires à l’échelle nationale avec une faible capacité
d’exportation, bien qu’elles constituent 96,6% du tissu économique.