03/07/2019

La CGEM réclame la révision du code des marchés publics


Pour leur 10e escale régionale sur les délais de paiement, les responsables du ministère de l'Intérieur, la Trésorerie générale du Royaume (TGR), la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) et la Direction des entreprises publiques et de la privatisation, se sont rendus à Fès.
Leur rencontre de sensibilisation sur l'amélioration du climat des affaires et la réduction des délais de paiement de l’État et des collectivités locales s’est soldée par une palette de recommandations. Décryptage.
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■ Une refonte du code des marchés publics s’impose
Pour Khalid Safir, wali, directeur général des collectivités locales, «cette rencontre offre une occasion pour les divers opérateurs économiques de la région d’échanger les points de vue et prendre acte des mesures prises pour réduire les délais de paiement et maîtriser les dettes dues aux fournisseurs». A noter que le département de l’Intérieur accorde un intérêt particulier à l'amélioration du climat des affaires et la relance des investissements et la création des postes d'emplois. Pour y parvenir, «une refonte du code des marchés publics s’impose afin de préserver l’entreprise et l’inciter à respecter les délais», recommande d’emblée Aziz Fertahi, président de la CGEM Meknès-Ifrane. Pour lui, «les délais d’appel d’offres de 21 jours sont correctes, mais il faut mettre fin au CPS modificatifs». A ce titre, le changement répétitif des CPS des appels d’offres en cours de route (avant l’expiration des délais d’appel d’offres) est à bannir. Car, il pénalise les entreprises. Surtout, celles qui ne peuvent pas assurer une veille devant le site électronique des marchés publics, ou encore celles qui ont soumissionné dans les délais et après une véritable étude de l’offre initiale. «Parfois, les CPS modificatifs sont publiés la veille de l’ouverture des plis», s’insurge Fertahi.
■ L’indexation des prix pose problème aussi
La révision des prix appliqués par l’administration, connue sous l’intitulé «d’indexation des prix», pose également problème. Ceci, surtout pour les produits noirs, le bitume et ses émissions entre autres. En ce sens, les entreprises qui soumissionnent plusieurs mois à l’avance sont pénalisées par la fluctuation des devises, parfois à des rabais allant jusqu’à un million de DH/km. Et le contraire, quand les prix chutent. Pour mettre un terme à cette relation «floue», le président de la CGEM Meknès-Ifrane propose «un règlement constant et équilibré». En d’autres termes, respecter les prix à la soumission. En outre, selon ce patron de bureau d’études (BTP), l’annulation des appels d’offres est sujette à caution. Car, si l’administration a balisé son étude pour un chantier donné, et les soumissionnaires ont présenté les qualifications requises, la réalisation des travaux doit être actée. Autrement, toute annulation de marché alimenterait le doute chez les soumissionnaires. A telle enseigne que «certains croient que le maître d’ouvrage voudrait octroyer le marché à une entreprise donnée». D’où l’obligation de réglementer (ndlr: justifier aussi) les annulations.
■ L’incohérence des articles 40 et 41 du code des appels d’offres
Autre recommandation, lutter contre l’incohérence des articles de loi. A ce propos, les articles 40 (sur l’évaluation des offres des concurrents) et 41 (offre excessive ou anormalement basse) du code des appels d’offres sont visés. Ainsi, si l’article 40 parle de l’offre la plus avantageuse en faisant référence au moins disant, l’article 41 souligne pour sa part, que la commission «peut» écarter des offres comportant des prix excessifs ou anormalement bas. Pour Fertahi, les règles d’attribution de marché doivent être claires et transparentes. Ceci, afin de lutter contre les jugements subjectifs. Aussi, l’attribution des marchés par les sous-ordonnateurs provinciaux doit être justifiée et expliquée sur le site des marchés publics. «Nous ne sommes pas intéressés par les motifs d’éviction des autres soumissionnaires… ce qui nous intéresse plutôt sont les critères de choix pour s’améliorer et s’adapter», explique-t-il. Et d’ajouter: «cette proposition renforcera la transparence de l’opération d’octroi des marchés publics». Aussi, il faut en finir avec des ordonnateurs «juges et parties» qui sous prétexte de ne pas être convaincus par une entreprise l’écartent même en proposant une offre moins-disante.
■ Donner du lest aux régions et préserver les fonds publics
Par ailleurs, les directeurs provinciaux peuvent lancer des marchés publics à hauteur de 5 millions de DH. Ils élaborent les CPS, annulent ou approuvent les marchés, les exécutent et les liquident à leur guise. «Etant donné que les marchés de moins de 5 millions de DH de budget ne sont pas auditables, ces directeurs échappent à tout contrôle. Ce qui représente une grande lacune au niveau de l’actuel code des marchés, à corriger dans les plus brefs délais», suggère le patron des patrons de Meknès-Ifrane. Pour lui, il faut préserver les fonds publics avec des textes fiables. En attendant, l’administration doit sérieusement étudier l’âge des marchés, en cours, exécutés, et liquidés. «Certains remontent à 2006, leurs cautions ne sont jamais récupérées. Pire, les agios payés par l’entreprise dépassent la valeur du marché lui-même», déplore le responsable patronal. Pour y parvenir, la révision du code des marchés publics doit se faire une fois tous les 4 ans. En outre, la classification des laboratoires et bureaux d’études qui opèrent avec les communes est obligatoire, à l’instar de ce qui est fait pour les entreprises. «Ce qui exigera la sélection de laboratoires qualifiés et des bureaux de contrôles de haut niveau, autrement à l’embauche d’un personnel (ingénieurs, techniciens…) de qualité», conclut Fertahi.


Des décisions concrètes
Pour réduire les délais de paiement et améliorer la procédure de paiement des commandes publiques, deux décisions concrètes ont été prises, en l’occurrence la création par la trésorerie générale du royaume d’un système électronique de dépôt des factures et des plaintes dans le cadre de la Gestion intégrée des dépenses (GID) et la publication de trois décisions communes entre les ministres de l’Intérieur et de l’économie et des finances sur l’intégration des intérêts de retards dans la liste des dépenses des collectivités territoriales. Car, «le retard de paiement représente une menace pour le climat des affaires et les équilibres financiers des entreprises», estime Khalid Safir. «La transparence des procédures et la réduction des délais de paiement sont érigées en priorité nationale, afin d’améliorer le climat des affaires et de réduire les risques qui guettent les entreprises», reconnaît le wali directeur de la DGCL.