01/03/2013

L’insolvabilité de l’ONEE asphyxie les PME

Les entreprises qui travaillent avec l’Office national de l’électricité et de l’eau potable sont à l’agonie. La situation est critique pour celles qui opèrent dans le  secteur électrique. Elles n’ont pas été payées depuis plusieurs mois, voir depuis 2011 pour certaines. Les montants en jeu dépasseraient les 5 milliards de dirhams, un chiffre contesté par l’Office.
Tout autant que le nombre d’entreprises concernées: «nous avons reçu une lettre de 22 entreprises réclamant des retards de paiement de la part de l’ONEE-branche électricité sans indiquer les montants réclamés».
Ni la dernière loi sur les délais de paiement, ni les différents courriers adressés par la Fédération nationale de l’électricité électronique (Fenelec) à l’Office n’ont permis de résoudre le problème.  Les entreprises du secteur, qui menacent d’observer un sit-in devant le siège de l’électricien marocain, ont même saisi le chef de gouvernement ainsi que le ministre de l’Energie. Les courriers dont L’Economiste détient une copie sont datés du 4 février.
Contacté, l’ONEE estime qu’il s’agit d’un problème momentané: «comme toute entreprise, notamment celles en charge d’un service public, il nous arrive de connaître, en matière de paiement, des problèmes ponctuels et circonscrits dans le temps». Dans le secteur de l’électricité, la situation est telle que plusieurs entreprises s’apprêtent à cesser toute activité, incapables d’honorer leurs engagements auprès de leurs fournisseurs et n’ont plus de facilité auprès des banques. Certaines, même si elles ont réduit les effectifs, ont toujours du mal à payer les salaires. «C’est la catastrophe: la CNSS nous tient par la gorge ainsi que le fisc, les mises en demeure des avocats des salariés et des fournisseurs tombent les unes après les autres. Quant aux banques, elles ont fermé le robinet», soutient un chef d’entreprise qui réclame 100 millions de dirhams à l’Office. Des opérateurs se plaignent aussi d’absence d’interlocuteurs: «nous sommes ballotés entre les services de l’Office, à la Fenelec(1) on nous demande de patienter car l’ONE a des problèmes financiers. Mais cette fédération doit prendre ses responsabilités et mieux défendre les intérêts de ses adhérents».
Pour plusieurs entreprises, les courriers adressés au chef de gouvernement et au ministre de l’Energie ne suffisent pas. Elles auraient souhaité que leur fédération se montre plus active. «Des fonds sont accordés à l’ONEE par des organismes internationaux pour financer des projets sur lesquels nous travaillons mais pour autant nous ne sommes pas payés. Il est temps que l’on examine les comptes de cet Office pour vérifier si une partie des fonds n’est pas affectée à son fonctionnement», déclare un chef d’entreprise.
Aujourd’hui, les relations entre l’ONEE, qui reste un donneur d’ordre important, et les entreprises sont déséquilibrées. D’ailleurs les opérateurs préfèrent garder l’anonymat par crainte de représailles. D’un côté, l’Office accumule les retards de paiement et de l’autre, son service technique presse les entreprises à terminer les travaux et applique les pénalités pour tout manquement. «L’Office n’hésite pas à appliquer des pénalités de retard et à les défalquer directement des montants dus aux entreprises», soutient un opérateur.  Les problèmes entre l’ONEE et les entreprises du secteur électrique ne sont pas nouveaux. Il y a quelques mois ces dernières avaient tiré la sonnette d’alarme sur les délais de paiement qui battaient des records entre 180 à 200 jours.
Depuis plusieurs années déjà, cet Office connaît des difficultés financières. Une situation qui a poussé le gouvernement à injecter 500 millions de dirhams, soit une partie des 3 milliards de dirhams devant servir à la recapitalisation de l’Office. Le reste devant être débloqué par la suite, soit le temps de mettre en place un nouveau contrat-programme. Mais ce document en discussion depuis l’année dernière n’arrive toujours pas à voir le jour. Le dossier butte sur la tarification. L’idée étant d’introduire des réajustements au niveau de grille de la moyenne tension par rapport à celle de la très haute tension.  Ce qui devrait se solder par une augmentation des tarifs. Différents scénarios seraient proposés au gouvernement qui n’arrive toujours pas à trancher. En attendant, l’Office, dont les tarifs sont réglementés, vend de l’électricité à perte.