20/04/2011

Une nouvelle génération de réformes de la réglementation des marchés publics au Maroc

Une nouvelle génération de réformes de la réglementation des marchés publics est actuellement en cours de finalisation au Secrétariat Général du Gouvernement. Après deux années de mise en œuvre du décret de 2007 un certain nombre d’insuffisances et de dysfonctionnements ont été identifiés et auxquels il est nécessaire de remédier.

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Lors de son intervention en mars 2011 à la Chambre Française du Commerce et d’Industrie du Maroc dans le cadre d’une conférence sur « La stratégie de l’investissement public et l’efficience des marchés publics » M. Noureddine BENSOUDA, Trésorier Général du Royaume, avance que la réforme projetée, est fondée sur une démarche concertée, élargie à tous les partenaires intervenant dans le processus des marchés publics.

Durant plus de deux années, le projet de décret sur les marchés publics a fait l’objet de débat entre les principaux acteurs et partenaires concernés par la commande publique, à savoir :
·         les acheteurs publics : Etat, collectivités locales et établissements publics à caractère administratif ;
·         les entreprises privées ou les fédérations d’entreprises ;
·         la société civile ;
·         les organes de contrôle ou institutions internationales intervenant dans ce domaine.

Tous les partenaires nationaux et internationaux ainsi que les citoyens eux-mêmes, ont pu enrichir par leurs observations et leurs propositions ledit projet. En effet, la commission chargée de la publication des projets de textes instituée par le décret n°2-08-229 du 25 joumada I 1430 (21 mai 2009) instituant une procédure de publication des projets de textes législatif et réglementaires, a mis en ligne en date du 18/02/2010 le projet de décret sur les marchés publics, enregistrant ainsi une première dans les pratiques de l’élaboration de la réglementation au Maroc.

La note accompagnant ce projet de décret présente les principaux axes d’innovations de la réforme comme suite: 
1- Consécration de l’unicité de la réglementation en matière de marchés publics :
Eu égard à la nécessité d’harmonisation et de normalisation du processus d’achat public pour l’ensemble des acteurs notamment, pour les entreprises candidates à la commande publique, la réforme préconise l’adoption d’un décret unique pour les marchés de l’Etat, des établissements et entreprises publics et des collectivités locales et de leurs groupements.
Le principe d’unicité de la réglementation des marchés publics a été également, consolidé par l’intégration des prestations architecturales dans le cadre du nouveau dispositif devant régir les conditions et les règles de passation des marchés publics. Néanmoins et tout en préconisant l’unicité de la réglementation, la réforme proposée prend largement en considération les spécificités liées aux organismes ci dessus.
Dans le même ordre d’idées le portail des marchés de l’Etat a été consacré comme portail national et fédérateur pour l’ensemble de la commande publique.

2- Simplification et clarification des procédures :
Les principales innovations en relation avec l’esprit de simplification et de clarification des procédures se rapportent aux points suivants :
- précision des modalités d’appréhension de l’offre la plus avantageuse selon la nature des prestations concernées (travaux, fournitures, services) ;
- clarification et simplification des modalités d’appréciation des offres anormalement basses ou excessives et des prix anormalement bas;
- suppression du mécanisme du tirage au sort pour la désignation des représentants de l’administration dans la commission d’appel d’offres;
- précision des conditions de constitution, de restitution et de confiscation des cautionnements provisoires ;
- clarification des modalités d’examen et d’attribution des lots pour les marchés allotis;
- définition et précision des marchés de location et de location avec option d’achat ; 
- réservation d’un chapitre propre aux marchés des prestations architecturales ; 
- extension de la durée des marchés cadres à 5 ans pour la location de longue durée des véhicules et d’acquisition du matériel informatique;
- simplification du dossier administratif des concurrents, à travers la précision que l’attestation fiscale, l’attestation de la CNSS et le registre de commerce ne seront demandés qu’au concurrent auquel l’administration envisage d’attribuer le marché ;
- précision et rationalisation de la composition des commissions de jugement des offres selon le mode de passation des marchés et selon les spécificités liées aux marchés de l’Etat, des établissements et entreprises publics et des collectivités locales et leurs groupements ;

3– Renforcement du recours à la concurrence et de l’égalité de traitement des concurrents :
Les principales innovations introduites en matière de renforcement des procédures de recours à la concurrence, d’égalité d’accès des concurrents à la commande publique et d’équité dans le traitement des soumissionnaires peuvent être résumées dans les points suivants :
- introduction du mécanisme d’appel à manifestation d’intérêt pour les prestations particulières, complexes et qui nécessitent une identification préalable des concurrents potentiels;
- précision que la déclaration d’un appel d’offres infructueux pour raison d’absence d’offres présentées ou déposées ne peut justifier le recours à la procédure négociée qu’à la suite d’un deuxième appel d’offres lancé dans les mêmes conditions initiales est déclaré lui-même infructueux en vue de débloquer la procédure ;
- précision que l’annulation d’un appel à la concurrence doit donner lieu à une décision de l’autorité compétente dûment signée, relatant les motifs ayant présidé à son annulation, avec obligation de publication des références de cette décision au portail des marchés publics et sa communication aux membres de la commission de jugement des offres ;
- limitation de la possibilité de désignation des personnes habilitées à engager les dépenses par bons de commande à l’ordonnateur et au sous-ordonnateur pour limiter le fractionnement des dépenses, sauf pour l’administration de la défense nationale ;
- précision que les prestations sur bons de commande doivent faire l’objet d’une concurrence préalable matérialisée par la production d’au moins trois devis contradictoires, sauf impossibilité ou incompatibilité justifiée par une note du maître d’ouvrage relatant les motifs de l’impossibilité ou de l’incompatibilité ;

4– Consolidation du dispositif de transparence et de moralisation de la gestion de la commande publique :
La consolidation des mécanismes de transparence, d’intégrité et de moralisation de la gestion des marchés publics a été marquée par l’introduction des innovations suivantes :
- consécration de l’interdiction d’existence de conflits d’intérêt dans le domaine des marchés publics;
- précision et enrichissement du contenu du rapport établi et signé par le maître d’ouvrage à l’issue d’une procédure négociée ;
- précision du contenu et des modalités de la publication du programme prévisionnel des marchés à lancer par le maître d’ouvrage pour opérationnaliser davantage ledit mécanisme en faveur d’une plus grande transparence dans la gestion de la commande publique ;
- institution d’un délai de 3 mois pour la préparation des rapports d’achèvement de l’exécution des marchés et précision des autorités destinataires desdits rapports;
- précision concernant le contenu de l’audit des marchés et des seuils pour l’Etat, les établissements et entreprises publics et les collectivités locales et leurs groupements.

5- Modernisation et introduction des TIC en matière de la gestion de la commande publique :
Les innovations essentielles en matière de modernisation du processus d’achat public ont porté sur :
- l’introduction de la procédure des marchés clé en main pour certaines prestations particulières portant notamment sur des procédés spéciaux et des processus de fabrication étroitement intégrés ou des travaux d’un type spécifique ;
- l’introduction de la possibilité de recours à la procédure d’achats groupés sur la base d’une convention conclue entre les maîtres d’ouvrages regroupés dans un collectif d’achat, en vue d’une plus grande rationalisation des dépenses publiques et l’incitation à la réalisation d’économies de gestion ;
- l’ouverture de la réglementation régissant les marchés publics sur la possibilité de recours à la procédure de choix des offres au moyen d’enchères électroniques pour les marchés de fournitures courantes dont les spécifications peuvent être établies préalablement de manière précise ;
- la dématérialisation de la commande publique notamment, la mise en place d’une base de données des fournisseurs en vue de dématérialiser les dossiers administratifs des concurrents leur permettant de la sorte, de se consacrer sur la préparation de leurs offres ;
- la soumission électronique dans le cadre d’un processus dématérialisé de dépôt et de dépouillement des offres permettant plus de transparence et une simplification des conditions de soumission aux entreprises ;
- la consécration de la formation des acheteurs publics comme moyen d’augmentation de leur capacité de gestion ;

6– Amélioration des garanties des concurrents et des mécanismes de recours et de réclamation :
En parallèle au chantier de réforme en cours de la commission des marchés et en relation avec d’autres garanties accordées aux concurrents, le projet de décret sur les marchés publics a introduit en matière de recours et de réclamation les innovations ci-après :
- introduction de la possibilité pour les concurrents qui estiment ne pas pouvoir préparer leurs offres dans les délais de publicité requis de demander le report de la date d’ouverture des plis après appréciation du maître d’ouvrage ;
- systématisation de la révision des prix à tous les marchés de travaux quels que soient leurs montants ou leurs délais d’exécution et exclusion des marchés de fournitures et de services de cette révision;
- introduction d’un délai d’attente (standstill) en matière d’approbation des marchés (15 jours) au cours duquel, l’autorité compétente ne peut pas approuver les marchés, à l’effet de laisser la possibilité aux concurrents d’introduire leur recours administratif, conformément aux standards en vigueur à l’international en cette matière ;
- introduction de la possibilité pour les concurrents de saisir directement la commission des marchés, sans attendre les réponses du maître d’ouvrage et du ministre concerné ;
- institution d’un délai maximum de 30 jours selon le cas, pour le ministre concerné pour le ministre de l’intérieur et pour le ministre dont relève l’établissement ou l’entreprise publique pour répondre aux réclamations des concurrents ;
- institution d’un délai de 30 jours à la commission des marchés pour répondre aux requêtes et réclamations des concurrents ;
- institution de l’obligation de tenue d’un registre de suivi des réclamations par les autorités administratives auprès desquelles les réclamations sont déposées.

7. Prise en compte de la protection de l’environnement :
La protection de l’environnement et le développement durable sont désormais considérés comme un principe en matière de passation des marchés publics et un des critères de la gestion performante des commandes publiques.